Chantier-école : Humathèqye (2024)
Formation

Chantiers-école : focus sur le chantier des Arts graphiques à l’Humathèque du Campus Condorcet

L’exercice pédagogique du chantier-école existe au département des restaurateurs depuis la création de l’Institut français de restauration des œuvres d’art en 1977. La programmation des cours est organisée de manière à réserver des semaines entières pour permettre l’organisation de ces chantiers, en octobre, en février et en juin. Il s’agit de mener une étude préalable ou des traitements sur un ou plusieurs biens culturels conservés dans une institution patrimoniale en travaillant in-situ.

Les chantiers sont organisés par spécialité, parfois en collaboration avec d’autres formations en conservation-restauration, comme l’École supérieure d’art Tours – Angers – Le Mans. Ces chantiers durent une ou deux semaines et sont préparés et encadrés par les enseignants (responsable ou assistant) ou par un intervenant extérieur, un restaurateur diplômé. Cette mise en situation professionnelle permet aux élèves de se projeter sur des interventions dans un temps limité, de réfléchir et de mettre en œuvre la logistique afférente, de travailler en équipe, de se confronter à la monumentalité et/ou à la masse dans des lieux parfois contraints ou des installations de chantier, de découvrir toutes les dimensions (historiques, d’organisation, etc.) de l’institution culturelle qui les accueille, d’établir des relations professionnelles avec le responsable scientifique des œuvres ou du lieu, de gérer la documentation en chantier et de réfléchir à une organisation de travail.

À cette occasion, l’institution d’accueil bénéficie d’un travail d’étude, de conservation préventive et/ou de traitement d’une partie de ses collections. Les protocoles établis par les élèves et leurs conclusions sont remis à l’institution d’accueil dans les mois qui suivent la fin du chantier-école, sous forme de rapport et de restitution orale dans la plupart des cas.

Le fonds Millet de l’EPHE–PSL

Tout premier français, historien de l’art byzantin, l’archéologue Gabriel Millet (1867-1953) a légué à l’École Pratique des Hautes Études (EPHE), où il a enseigné entre 1898 et 1937, un fonds documentaire foisonnant constitué au cours de ses nombreuses missions archéologiques. Des relevés de fresques aux vues d’édifices réels ou imaginaires et des sujets religieux, en passant par des détails architecturaux, ce sont près d’une centaine d’œuvres qui ont été produites par des artistes-peintres, certains diplômés des Beaux-Arts, et envoyés en Grèce avec le concours du ministère de l'Instruction.

Associées à d'autres objets d'étude et assemblées en un "petit musée", ces œuvres ont été un support d’enseignement pour les cours que Gabriel Millet dispensait à la Sorbonne. À ce titre, elles étaient manipulées fréquemment, ou encadrées et longuement exposées sur les murs, avant d’être stockées dans des lieux inadaptés voire, pour certaines, de subir les fumées de l’incendie de la Sorbonne en 1995. Aujourd’hui, le fonds Millet a rejoint les réserves de l’Humathèque à Aubervilliers. Ouverte en janvier 2022 et située au cœur du campus Condorcet, l’Humathèque a pour mission de recevoir en dépôt, de traiter, de communiquer et de valoriser les collections d’une cinquantaine de bibliothèques universitaires et services d’archives d’Île-de-France.

Une gravure du fonds Millet - Photo : INP
Une gravure du fonds Millet - Photo : INP

21 dessins du fonds Millet traités


À l’occasion de ce chantier-école, 21 dessins du fonds Millet ont été sélectionnés et traités. Parmi ces œuvres empoussiérées et encrassées, 17 étaient mises en danger par leur encadrement avec des matériaux acides et 3 étaient en feuille libre. L’objectif principal de ce chantier-école était de retirer les œuvres de leurs cadres afin de les assainir et d’envisager les restaurations nécessaires à réaliser.

Un constat d’état général a été réalisé, précisant les dimensions, les techniques employées par les artistes, les types de papier, les altérations et les types de montage de chaque œuvre. Les œuvres ont ensuite été photographiées, puis séparées de leur encadrement respectif. Pour chaque objet, l’intervention s’est déroulée en deux phases : le traitement de l’œuvre et le traitement du cadre. En effet, l’encadrement faisant partie de l’histoire de l’œuvre, il était important de le conserver.

Les cadres et les verres ont fait l’objet d’un premier nettoyage. Les morceaux de rubans adhésifs présents sur les cadres ont été retirés à la spatule et les cadres ont été dépoussiérés à l’aide d’un micro-aspirateur. Les verres ont été nettoyés à l’aide d’un spray et fixés à leurs cadres respectifs par des bandes de kraft. Un carton a été placé au dos des cadres afin d’assurer le maintien des verres fragiles lors des manipulations. Chaque cadre et son verre associé ont été replacés dans leur conditionnement initial. Le marquage des emballages a également été assuré avant le retour des cadres en réserve.

Les dessins, majoritairement réalisés au graphite, à l’aquarelle et à la gouache, présentent des fragilités liées aux techniques utilisées. Ils ont donc nécessité un dépoussiérage léger et précautionneux pour ne pas estomper les tracés. Pour cette étape, un pinceau doux et une gomme en polyuréthane ont été utilisés. Les montages, plus résistants, ont été gommés à l’aide d’une gomme en latex, aussi appelée « smoke sponge », qui, par sa structure physique, permet de piéger les salissures. Un dessin présentait des traces de moisissure active et a fait l’objet d’un traitement à l’éthanol. Une fois assainies, les œuvres ont été conditionnées dans des pochettes individuelles en papier neutre de conservation.

L’étude matérielle réalisée par les élèves sur cet ensemble a contribué à l’enrichissement de la base de données de l’Humathèque, ainsi qu’à donner des préconisations pour de futures interventions de conservation-restauration. Ce chantier-école a permis d’envisager la poursuite de la restauration de ces dessins au sein des ateliers de l’INP, proposition qui sera soumise aux acteurs du projet. Les dessins seront retirés de leurs montages acides et des consolidations seront réalisées sur les œuvres qui présentent des altérations structurelles, telles que des déchirures.

Une élève au travail sur le fonds Millet, 2024 - Photo : INP
Une élève au travail sur le fonds Millet, 2024 - Photo : INP
Une élève au travail sur le fonds Millet, 2024 - Photo : INP

Tout au long de ce chantier, les élèves ont pu découvrir les attentes et objectifs d’un projet de conservation-restauration d’arts graphiques dans une bibliothèque et appréhender ce fonds dans son contexte de conservation. Elles ont également eu la chance de travailler sur des œuvres aux techniques variées (aquarelle, gouache, graphite) et de découvrir l’univers de l’archéologie byzantine à travers différents regards d’artistes. La fraîcheur des dessins et la beauté des vues ont rendu cette semaine de chantier particulièrement agréable et ont donné aux étudiantes l’envie de visiter à leur tour la Grèce.

Les élèves ont travaillé encadrées par Valérie Lee, responsable de la spécialité Arts graphiques et livres de l’Inp, sur proposition de Ioanna Rapti, directrice d’études à l’EPHE–PSL et directrice du Centre Gabriel Millet dans la même institution, et de Palmira De Sousa, responsable des entrées et de la conservation à l’Humathèque.

Les élèves du département des restaurateurs publient dans Variations patrimoniales, le carnet de recherche Hypothèse de l'Institut, les comptes-rendus des chantiers-école les plus marquants : https://inp.hypotheses.org/category/preserver-et-transmettre/chantiers-ecole

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